Résumé :
|
Le livre dont est extrait cet article a été publié en 1948, alors que le monde pansait encore les plaies de la Seconde Guerre mondiale. Albert Einstein en fit ce commentaire : "On sent d'une façon aiguë, en le lisant, la futilité de la plupart nos querelles politiques comparées avec les réalités profondes de la vie." L'auteur, Fairfield Osborn Jr, est le fils d'un grand paléontologue américain auquel on doit, en particulier, la découverte du Tyrannosaurus rex et celle du Velociraptor. Il fut lui-même un naturaliste éminent qui présida la New York Zoological Society - devenue, sous le nom de Wildlife Conservation Society, une importante organisation non gouvernementale qui se consacre à la protection de la nature. Cet ouvrage - traduit et publié en français par les éditions Payot dès 1949, réédité par Actes Sud en 2008 - témoigne d'une prise de conscience du problème global que pose la cohabitation de l'homme avec les formes de vie qui peuplent la planète. Il précède de 14 ans le célèbre « printemps silencieux » de Rachel Carson. À la différence de la plupart des auteurs contemporains, Osborn place en première ligne le phénomène démographique, la pullulation de ceux qu'il appelle les "enfants de la Terre". Il pose ensuite le problème de la guerre, relevant qu'elle est le propre de l'homme - sauf à descendre à ce qu'il appelle "des formes inférieures de la vie animale" comme les fourmis. Il condamne l'idée que - toute dimension éthique mise de côté - la guerre puisse être un outil de régulation de la démographie mondiale. Le terme qu'il utilise pour caractériser l'action de l'homme, "une nouvelle force géologique", annonce le néologisme proposé par Paul Crutzen pour caractériser notre ère : l'anthropocène. Naturellement, certains éléments du tableau lui échappent, soit que leur importance ne soit pas encore reconnue, comme l'altération du climat par les gaz à effet de serre, soit que leur proximité ne soit pas encore menaçante, comme l'épuisement des réserves pétrolières. Mais d'autres sont identifiés avec lucidité : la mondialisation qui n'avait encore atteint l'intensité que nous lui connaissons aujourd'hui et qui rend chaque nation "plus ou moins dépendante de toutes les autres" ; les problèmes de ressources alimentaires qui nous confrontent aux limites des terres productrices, car l'homme ne se nourrit que du vivant. Aussi en arrive-t-il à la conclusion que la technique, quels que soient ses progrès, ne nous évitera pas la nécessité d'une profonde transformation de nos comportements collectifs, qui conduise à un équilibre durable avec la nature.
|