| Titre : | Conseil d’État, 16 janvier 2024, arrêt n° 258.454 (2025) |
| Type de document : | Article : site web ou document numérique |
| Dans : | Revue de fiscalité régionale et locale (2024/3, 16/09/2025) |
| Langues: | Français |
| Sujets : |
IESN Conseil d'Etat ; Impôts communaux ; Jurisprudence (général) ; Procédure (droit) |
| Résumé : |
1. L'intérêt au recours doit être légitime, c'est-à-dire qu'il ne s'assimile pas au maintien d'une situation illégale, autrement dit contraire aux lois impératives, à l'ordre public ou aux bonnes mœurs. À supposer qu'une situation infractionnelle en lien avec l'objet d'un règlement-taxe attaqué soit avérée, l'annulation éventuelle de ce règlement-taxe ne permettrait pas de maintenir cette situation, puisque l'annulation ne ferait pas obstacle à l'introduction des procédures pénales et administratives prévues pour mettre fin aux infractions. Il en résulte que l'intérêt d'une société requérante à voir annuler cette taxe n'est pas illégitime pour ce seul motif. Une atteinte aux intérêts économiques et financiers d'une société requérante est, en principe, réparable, dès lors qu'un tel préjudice peut être compensé par l'octroi de dommages et intérêts ou d'une indemnité réparatrice en cas d'annulation de l'acte attaqué. Il n'en va autrement que si la société requérante établit concrètement que cette atteinte est elle-même à l'origine de conséquences irréversibles ou difficilement réversibles sur sa santé financière au point, notamment, de ne plus lui permettre de faire face à ses obligations à très brefs délais. 2. Conformément à l'article 61 du Code du recouvrement amiable et forcé des créances fiscales et non fiscales rendu applicable par l'article L3321‑12 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (CDLD), en cas de recours administratif ou d'action en justice, les taxes communales sont considérées comme une créance liquide et certaine et peuvent être recouvrées par voies d'exécution dans la mesure où elles correspondent au montant des revenus déclarés ou lorsqu'ils ont été établis d'office à défaut de déclaration, dans la mesure où ils n'excèdent pas la dernière imposition définitivement établie à charge du redevable pour un exercice d'imposition antérieur. Il en résulte que, lorsque quand bien même des montants prévus sont légèrement inférieurs à un règlement-taxe précédent, l'exécution immédiate de règlements-taxes attaqués pourrait avoir des conséquences suffisamment graves sur la santé financière d'une société requérante pour que le cours normal de la procédure au fond ne permette pas qu'un arrêt d'annulation puisse utilement prévenir cet inconvénient. 3. L'établissement d'une taxe communale est, en vertu des articles 41, 162, 2°, et 170, § 4, de la Constitution, une matière d'intérêt communal qu'il appartient aux conseils communaux de régler, sauf les exceptions déterminées par la loi et dont la nécessité est démontrée, pour autant que, sous le contrôle des autorités de tutelle et des juridictions compétentes, l'établissement d'un tel impôt ne viole pas la loi ou ne blesse pas l'intérêt général. Dans ces limites, le pouvoir fiscal des communes relève de l'autonomie que leur reconnaît le Constituant. Dans le cadre de cette autonomie, les communes disposent d'un pouvoir discrétionnaire pour déterminer ce qu'elles entendent taxer et dans quelle mesure elles le souhaitent, ainsi que les objectifs sous-jacents à leurs règlementations fiscales, seule l'erreur manifeste d'appréciation ou l'erreur en fait pouvant être censurée. Il est de la nature même d'un impôt de poursuivre un objectif de financement des missions de service public à charge de la collectivité concernée. Une commune est libre, lorsqu'elle établit des taxes justifiées par l'état de ses finances, de faire porter l'imposition sur des activités qu'elle juge présenter pour elle des charges et des inconvénients particuliers. Il ne lui est pas non plus interdit de faire porter les impositions qu'elle établit sur des activités dont elle souhaite limiter le développement. Les règles constitutionnelles relatives à l'égalité devant l'impôt, consacrées par les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, n'excluent pas qu'un régime fiscal différent soit établi à l'égard de certaines catégories de biens ou de personnes, pourvu que le critère de différenciation soit susceptible de justification objective et raisonnable. Les mêmes règles s'opposent, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de biens ou de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure considérée, sont essentiellement différentes. L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la taxe visée, ainsi que de la nature des principes en cause, en respectant un rapport de proportionnalité entre les moyens utilisés et le but poursuivi. Par ailleurs, le législateur fiscal doit pouvoir faire usage de catégories qui, nécessairement, n'appréhendent la diversité des situations qu'avec un certain degré d'approximation. De telles considérations s'appliquent également aux conseils communaux lorsqu'ils adoptent des règlements-taxe. Au regard de l'objectif environnemental visant à diminuer le nombre d'embarcations commerciales, le fait de taxer d'office d'une manière identique celle qui est effectivement utilisée sur la Lesse et celle qui ne l'est pas, éventuellement pour des raisons indépendantes de la volonté de l'exploitant, ne semble pas susceptible d'une justification raisonnable. Ce mode de taxation est de nature à inciter les exploitants à louer le nombre maximum d'embarcations autorisé par le permis d'environnement, puisqu'elles sont toutes taxées. Par ailleurs, ce mode de taxation ne tient également aucun compte des facultés contributives de l'exploitant puisque celui qui est dans l'impossibilité de louer tout ou partie de ses embarcations doit contribuer d'une manière identique à celui qui peut bénéficier des revenus liées à l'exploitation de l'ensemble de ses embarcations. (Conseil d’État, 16 janvier 2024, arrêt n° 258.454, R.F.R.L., 2024/3, p. 310-318.) |
| Note de contenu : |
Impôts communaux - Procédure - Conseil d'État - Recevabilité du recours en annulation - Intérêt du requérant - Intérêt légitime - Maintien d'une situation illégale - Appréciation - Impôts communaux - Taxe annuelle sur les embarcations - Principe d'égalité et de nondiscrimination - Identité de traitement de situations différentes - Taxation des embarcations utilisées et non utilisées - Principe de capacité contributive - Violation |
| En ligne : | https://www.stradalex.com/fr/sl_rev_utu/toc/rfrl_2024_3-fr/doc/rfrl2024_3p310 |
Exemplaires (1)
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